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Bruno Le Maire veut attaquer Google et Apple en justice pour pratiques commerciales abusives

AP

Apple rétorque au ministre en mettant en avant ses «solides relations avec des dizaines de milliers de développeurs à travers la France, qui ont gagné 1 milliard d'euros sur l'App Store».

Bruno Le Maire ouvre un nouveau front contre Apple et Google. La France va «assigner Google et Apple devant le tribunal de commerce de Paris pour pratiques commerciales abusives» a-t-il affirmé au micro de RTL ce mercredi matin. Il s'attaque plus précisément au mode de rémunération pratiqué dans leurs magasins d'applications App Store (sur les appareils Apple) et Google Play. Les deux géants fixent effectivement un barème de rémunération, qui est le même pour tout le monde. Les développeurs perçoivent 70% des revenus générés par l'achat d'une application, 85% dans le cas d'un abonnement à un service, et la plateforme empoche le solde.

Plusieurs angles d'attaque

Le principe du barème forfaitaire déplaît au ministre de l'Économie et des Finances, qui semble en découvrir le principe: «j'apprends que les développeurs se voient imposer des tarifs. Ce n'est pas l'économie que nous souhaitons». Visiblement scandalisé, il ajoute «Google et Apple n'ont pas à traiter nos start-up et nos développeurs de la façon dont ils le font. Nos développeurs se voient imposer des tarifs. Google et Apple récupèrent les données, peuvent modifier unilatéralement les contrats avec les développeurs. Tout ça est inacceptable». Au final, il menace de les frapper au portefeuille de sanctions «en millions d'euros».

Assignation de la DGCCRF

Dans les faits, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) a déjà assigné Apple et Google au nom e Bruno Le Maire. Elle demande «la cessation de leurs pratiques commerciales abusives et leur condamnation à une amende de 2 millions d'euros. Il appartient maintenant au tribunal de commerce de juger ces pratiques». Le montant peut sembler élever, il est toutefois à mettre en perspective avec les résultats des deux entreprises concernées. Apple a dégagé un bénéfice de 48,35 milliards de dollars au cours de son dernier exercice.

Le litige qui oppose l'administration française aux deux géants américains porte cette fois sur les magasins d'applications d'Apple (AppStore) et de Google (Google Play, pour les smartphones et tablettes sous Android). La DGCCRF considère que plusieurs clauses des contrats de ces magasins d'applications «caractérisent un «déséquilibre significatif», pratique prohibée par le code de commerce». L'administration met en cause des pratiques commerciales agressives. Elle leur reproche notamment de pouvoir décider de suspendre ou de supprimer une application. Comme Bruno Le Maire, la DGCCRF reproche à Apple et Google de fixer de manière unilatérale une fourchette de prix aux développeurs. Prix qui s'appliquent ensuite aux consommateurs.

Si l'intention peut sembler louable, ses conséquences sont plus compliquées à évaluer. Qu'en serait-il si chacun des développeurs français qui souhaitent se positionner sur un magasin d'applications devait négocier de gré à gré avec un des géants du Net? La situation pourrait virer au cauchemar pour les petites entreprises, alors que ni Apple ni Google n'ont prévu un tel cas de figure. Sans compter que ce serait la bataille du pot de fer contre le pot de terre! Par ailleurs, Bruno Le Maire semble mal comprendre le fonctionnement des boutiques d'applications. Il parle de «ventes», là où Apple et Google sont de simples distributeurs de services.

Ce n'est pas la seule attaque portée par le gouvernement à Apple et Google. Le ministre affirme aussi vouloir «obtenir d'ici la fin de l'année 2018 la taxation des géants du numérique, Google, Amazon, Facebook pour une application en Europe début 2019». La révision de l'assiette d'imposition des géants du Web prend des allures de vieilles lunes, alors que la France et une partie des pays européens cherchent à mettre fin à l'optimisation fiscale pratiquée par ces entreprises. Sandwich hollandais, double irlandais... ces drôles de recettes fiscales donnent des aigreurs d'estomac au locataire de Bercy. L'Europe a déjà demandé à Apple le remboursement de 13 milliards d'euros pour impôts payés en Irlande.

Les réponses de Google et Apple

Google n'a pas tardé à réagir, par le biais d'une déclaration officielle et sans ambiguité: «Avec plus de 1000 téléchargements par seconde, Google Play est un excellent moyen pour les développeurs d'applications en Europe, de toutes tailles, dont beaucoup en France, de proposer leurs applications aux utilisateurs du monde entier. Nous avons collaboré avec la DGCCRF sur de nombreux sujets ces dernières années, y compris sur Google Play. Nous considérons que nos conditions sont conformes à la législation française et nous sommes prêts à expliquer notre position devant les tribunaux».

De son côté Apple a choisi de mettre en avant les atouts que présentent son magasin d'application pour l'écosystème. «Nous sommes fiers d'avoir de solides relations avec des dizaines de milliers de développeurs à travers la France, qui ont gagné 1 milliard d'euros sur l'App Store. Beaucoup de ces développeurs talentueux ont fondé leurs entreprises avec une ou deux personnes et ont ensuite vu leurs équipes grandir pour offrir leurs applications aux utilisateurs dans 155 pays. Cela n'a été possible que grâce à l'investissement d'Apple dans iOS, les outils de développement et l'App Store. Apple a toujours défendu la confidentialité et la sécurité des utilisateurs et n'a pas accès aux transactions des utilisateurs avec des applications tierces. Nous sommes entièrement disposés à partager notre histoire devant les tribunaux français et à éclaircir ce malentendu. Dans l'intervalle, nous continuerons d'aider les développeurs français à réaliser leurs rêves et de soutenir les étudiants français dans leur apprentissage du code grâce à notre programme de codage.»

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